La chaleur au travail : Un facteur d’accidents du travail insuffisamment pris en compte…

20/07/2023

Canicules à répétition, apparition de nouveaux risques professionnels, aggravation de ceux déjà existants… La chaleur au travail est un sujet bien trop passé sous silence, alors que les conséquences prévisibles du dérèglement climatiques sont frappantes. 
A l’été 2022, en France uniquement, sept personnes sont décédées lieu de travail par suite de la canicule. Entre 2017 et 2022, les fortes chaleurs auraient entraîné la mort de 47 travailleurs, certains hors des jours de « canicule ». Les profils sont principalement des hommes, de 33 à 57 ans. Le manque de données sur le contexte rend difficile l’établissement du lien entre chaleur et accidents mortels. Les chiffres sont donc probablement sous-estimés. D’une part, les décès ne survenant pas sur le lieu de travail ne sont pas comptabilisés. D’autre part, depuis 2017, le lien potentiel entre décès et chaleur ne peut être établi que par l’Inspection du travail après enquête complémentaire, et non plus par le dispositif de signalement des médecins du travail comme c’était le cas précédemment. Les données restent transmises à Santé Publique France. 

Les fortes températures favorisent les accidents de travail car la vigilance des travailleurs baisse, les temps de réaction augmentent, l’exposition à la chaleur peut produire des tremblements, des troubles cardiaques, de l’hyperthermie, et de la détresse neurologique. Elle rend plus fréquent les cas d’intoxication chimique et de réaction allergique.  

Selon l’INRS, « au-delà de 30 °C pour une activité sédentaire, et 28 °C pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés ».

Selon Santé Publique France, certaines catégories de travailleurs sont particulièrement exposées : « les personnes occupant des postes de travail générant de la chaleur (boulangerie, pressing, restauration, etc.) ; (…) ayant à fournir des efforts physiques intenses (entreprises de déménagement, manutention, etc.) ; (…) travaillant en extérieur (bâtiment, travaux publics, agriculture, etc.) ; (…) occupant des postes de travail nécessitant une vigilance accrue (travail en hauteur, conduite de véhicule automobile, etc.) ; (…) portant des équipements de protection empêchant l’évaporation de la sueur ; les travailleurs journaliers et intérimaires ».

Dans son avis “Travail, santé-environnement : quels défis à relever face aux dérèglements climatiques ?” rendu le 25 avril dernier, le conseil économique, social et environnemental (CESE) rapporte que 3,6 millions de femmes et d’hommes sont exposés aux fortes chaleurs en France. L’avis pointe « le risque de voir les inégalités dans le travail (…) se creuser davantage dans le contexte du dérèglement climatique et de la dégradation des écosystèmes ». 

Des réponses concrètes sont donc attendues face à cet enjeu. Le code du travail ne détermine pas de température maximale de travail. Le décalage des horaires de travail est peu mis en place par les employeurs, et n’est pas toujours respecté quand c’est le cas. Cette mesure de prévention est rappelée dans le plan national de gestion des vagues de chaleur, présenté le 8 juin 2023 par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires mais uniquement sous la forme d’une recommandation. Dans son avis, le CESE déplore que les investissements dans la prévention de ce risque restent globalement très faibles. 
Les effets du réchauffement climatique impliqueraient de revoir les rythmes de travail et les objectifs de productivité. Le coût de l’inaction est bien plus important si l’on considère les dégâts physiques, l’accélération des inégalités, et les impacts croissants des dérèglements climatiques sur les conditions de travail. 

(Source JDS)