Les conditions de travail se sont-elles améliorées en 35 ans ?

Rédigé le 26/01/2024

La DARES a publié sur son site une visualisation des résultats des enquêtes conditions de travail entre 1984 et 2019, soit 35 ans de données : comment ont évolué les conditions physiques de travail ? Qu’en est-il des risques psychosociaux ? Qui est concerné par le télétravail ? La prévention progresse-t-elle ?

Les nuisances physiques tendent à augmenter

En trente-cinq ans, les conditions de travail physique se sont dégradées.

Ainsi, entre 1984 et 2019 :

  • La part de salariés qui portent ou déplacent des charges lourdes a plus que doublé, s’établissant à 35,8 % ;
  • Ceux qui risquent des accidents de la circulation au cours du travail sont passés de 17,3 % à 33,7 %.

Les hommes et les ouvriers sont les plus exposés à ces nuisances.

Focus : pénibilité et vieillissement
Lors d’un colloque pour les 30 ans de la DARES, le statisticien du travail Serge Volkoff a pointé que plusieurs conditions de travail mettent les vieillissants en difficulté. Ainsi, la proportion de salariés de plus de 60 ans travaillant habituellement de nuit est passée de 2,4 % en 2005 à 5,8 % en 2019.
D’ailleurs, plus de 37 % des salariés ne se sentent pas capables de faire le même travail jusqu’à la retraite. Pour les plus de 60 ans, le taux est passé de 5,3 % en 2005 à 6,1 % en 2019.

L’augmentation de ces expositions semble contradictoire avec la progression de la prévention. Depuis 2005, la part des salariés ayant reçu une formation à la sécurité est passée de 19,9 % à 30 %. En 2019, seuls 7,6 % des salariés déploraient un manque d’équipements de protection individuelle.

En dépit des principes généraux de prévention, les entreprises privilégient-elles une approche individuelle à la réduction des risques à la source et à la prévention collective ? L’hypothèse n’est pas à exclure.

Risques psychosociaux : un bilan en demi-teinte

L’exposition aux facteurs de risques psychosociaux varie selon les dimensions.

Le soutien social est en progression, avec plus de 8 salariés sur 10 qui peuvent se faire aider par les collègues en 2019. Le fait d’aborder collectivement les questions d’organisation du travail est quant à lui passé de 69,1 % à 80 %. De la même façon, le fait de devoir cacher ses émotions au travail tend à diminuer.

En revanche, les contraintes de rythme s’accentuent. Depuis 1984, les salariés qui déclarent que leur rythme de travail est imposé par un délai d’une heure au plus à respecter a quadruplé et concerné plus d’une personne sur cinq.

Focus sur le sens au travail
L’on pointe que les salariés avec des objectifs chiffrés sont plus nombreux que les autres à déclarer un faible sens au travail. Or, entre 2005 et 2019, la proportion de salariés devant atteindre des objectifs chiffrés a augmenté, passant de 30 % à 31,1 %.

Contact avec le public : un point de vigilance

Le contact avec le public, qui concerne notamment les femmes et les employés, est une source de dégradation des conditions de travail.

Cette contrainte a augmenté, passant de 60,8 % à 71,7 % entre 1991 et 2019.

En outre, les enquêtes mettent en évidence que le rythme de travail imposé par une demande extérieure exigeant une réponse immédiate a quasiment doublé depuis 1984 et concerne plus d’un salarié sur deux en 2019.

Des conditions de travail et préoccupations en mutation

Témoin de son temps, l’enquête conditions de travail intègre peu à peu des thématiques nouvelles.

La question sur le télétravail, introduite en 2019, met en évidence que 91,3 % des salariés ne télétravaillent jamais, proportion qui tombe à 72,1 % chez les cadres et professions intellectuelles supérieures.

Le suivi de cette question lors de la prochaine enquête conditions de travail permettra de vérifier si la période Covid a fait évoluer les pratiques.

Enfin, en lien avec le sens au travail, 32 % des salariés ont l’impression que le travail effectué a des conséquences négatives sur l’environnement. Ce taux monte à 46,3 % chez les ouvriers.

(Source Editions TISSOT)